Un fauteuil avec des roues, les
sangles, le dossier plastifié et humide, la paralysie, la solitude,
l'enfermement, le quotidien impersonnel, le personnel indifférent, l'absence
irrémédiable de la parole. Une visite. Un refrain. Le parfum d'une rose de
jardin. Les yeux s'ouvrent, les narines palpitent, le regard se pose sur moi,
un regard venu du fond de l'âme, l'appel d'un être sur le versant d'une fin de
vie redoutée, l'ombre qui plane comme un présage funeste, la main qui s'agrippe
à la mienne, légère et tiède comme une plume d'oiseau aux couleurs du ciel.
Ruisselle une pluie de larmes dans les rayons du soleil. Chatoiement des tons
universels dessinant dans l'espace une arche d'amour.
Je m’appelle Yves mais tout le monde m’a surnommé Yvon ou, quand je suis en colère, Yvan le Terrible. Il paraît qu’il a existé. Il a même été tsar de Russie. Moi, Yvon, je travaille le bois. J’aime son odeur, son toucher et sa belle allure quand j’en ai fini avec lui. Il faut préciser que je suis ébéniste et heureux de l’être. J’ai la faculté d’exercer un métier où je me réalise pleinement. C’est à la fois une activité et un plaisir. En ce moment, je rénove un meuble ancien que j’ai déniché dans le grenier poussiéreux de mes parents. C’est un « bonheur du jour », petit secrétaire destiné à la correspondance. Cela fait maintenant près de trois semaines que je remets à neuf ce ravissant petit meuble. Il est réjouissant de voir réapparaître les nervures du bois et de percevoir son odeur. Je laisse un moment planer mes pensées et lève les yeux. Par la fenêtre ouverte, me parviennent le gazouillis des oiseaux, la sourde rumeur de la ville et le carillon de Ste Eulalie. ...
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